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Kingdom of Heaven, de Ridley Scott

Au cinema, moi j’aime tout : les films drôles, les films tristes, les films qui font réfléchir, les films d’aventures, les polars, les thrillers, les westerns, les peplums, peut-être pas les films d’horreur, mais j’en ai vu aussi. Bref je suis accroc au ciné comme à la lecture, il y a pire comme drogue.



Le film de Ridley Scott réunit...

... une bonne partie des ingrédients ci-dessus, le message de la tolérance en plus.



Nous le savons tous (enfin je l’espère) que les croisades furent un bel exemple de l’intolérance religieuse catholique (il suffit de songer à ce qui se passa lors de la 4ème croisade à Albi et à Montségur où ils exterminèrent les Cathares); les petits envoyés du pape partirent vers l’orient, soi-disant pour libérer Jérusalem des mains infidèles, mais surtout pour s’approprier des terres et des richesses nouvelles.



Le film de Scott s’inspire d’événements réels, fortement romancés par le scénariste ; à ce propos je m’étonne encore et toujours des commentaires des critiques exprimant leur désappointement face à la romantisation d’un sujet.



C’est quoi leur problème à ces gens ? Le monde littéraire est bourré d’écrivains qui s’inspirent d’un fait historique pour « broder » un superbe roman et là personne ne s’insurge sur les libertés prises avec l’histoire. Alors pourquoi l’histoire vue par le cinéma doit-elle toujours raconter les faits exacts ?



Un film historique n’est pas nécessairement un documentaire, c’est même tout différent,; pour d’excellents documentaires, voyez Daniel Costello ou Michael Moore.



Tout comme le sujet de « Gladiator » s’inspirait de « La Chute de l’Empire Romain », « Kingdom of Heaven » reprend l’histoire des croisades lorsque Jerusalem vivait dans une période de paix relative, fragile, mais paix quand même. Pendant ce temps dans la France du 12ème siècle, c’est la famine, la misère partout et la superstition religieuse liée à l’intolérance habituelle des fanatiques.



Balian, un jeune maréchal-ferrant vient de perdre sa femme et son enfant, l’une s’étant suicidée à la mort de l’autre ; le jeune homme, nargué par le prêtre du village, le tue dans un moment de rage bien compréhensible. Il rejoint alors le seigneur Geoffrey de Ibelin, un croisé lui proposant de l’emmener à Jerusalem afin de défendre les plus démunis, pour être un véritable chevalier ; étant son fils bâtard, Balian héritera sera fait chevalier et héritera du domaine de son père lorsque celui aura péri pour l’avoir défendu contre les soudards de l’évêque (il a quand même tué un curé, non mais !).



Donc, notre jeune héros, après avoir subi un naufrage sur la mer, après avoir été attaqué dans le désert par un noble arable à qui il laissera la vie sauve, retrouve son père qui meurt, lui laissant un vaste domaine que le jeune homme fera prospérer. Il est dès lors fort apprécié de ceux pour qui l’honneur des chevaliers est plus important que les richesses, par le jeune roi lépreux, Baudouin IV et sa ravissante sœur, Sybilla, mariée à l’arrogant Guy de Lusignan qui perdra Jerusalem, car assoiffé de pouvoir.



Lusignan veut sa guerre sainte et il l’aura, aidé en cela par l’immonde Raynauld de Châtillon, un croisé assoiffé de richesses, n’hésitant pas à attaquer les Musulmans pour s’approprier leurs biens. A cause de lui, la paix précaire mais réelle qui règne grâce à Baudouin et Saladin sera saccagée et Saladin pourra reconquérir Jérusalem, âprement défendue par notre jeune héros.



C’est Ghassan Massoud, acteur syrien qui interprète Saladin et qui vole la vedette à tout le monde. Sauf peut-être à Orlando Bloom qui sans ses mignonnes oreilles pointues d’elfe dans « Lord of the Rings » porte tout le film sur ses épaules et fait oublier sa pitoyable performance de Priam dans le tout aussi lamentable « Troy ». Il est totalement crédible en jeune homme qui voudrait être un chevalier parfait, tolérant, aux visions de paix universelle vite ébranlées par les fanatiques des deux camps. Saladin, souverain pragmatique, était lui aussi confronté aux fanatiques religieux, aux mollah dans son propre camp.



Certains trouvent « Kingdom of Heaven » trop politiquement correct – personnellement je le trouve très correct et pas nécessairement politiquement ; il est difficile de ne pas comparer le film avec la situation actuelle et celle-ci n’est pas nécessairement à l’avantage de qui nous savons. Ridley Scott a confié les rôles des Musulmans à des acteurs arabes, car selon lui, eux seuls pouvaient interpréter ces rôles avec justesse; il a eu raison, ils sont tous plus vrais que nature.



Dans les rôles secondaires, on retrouve des grandes pointures comme Liam Neeson, le père de Balian ; Jeremy Irons en Tiresias un vrai chevalier régent de Jerusalem qui redoutait à juste titre le fanatisme des nobles catholiques ; Edward Norton dont on ne verra jamais les traits, est le jeune roi lépreux et c’est la ravissante Eva Green (fille de … dont elle a d’ailleurs hérité les mignonnes taches de rousseur et le talent) qui interprète Sybilla de Lusignan, mariée à 15 ans au seigneur Guy et qui deviendra reine de Jerusalem à la mort de son frère, ce qui servira évidemment les buts rapaces de son époux, encouragé par Raynauld de Châtillon. Les très beaux costumes et maquillages d’Eva Green m’ont fait penser au joli portrait de l’artiste belge Jean Portaels : « Portrait d’une jeune kabyle », que l’on peut admirer pour l’instant dans le cadre de l’expo « Romantisme dans la peinture belge » aux musées royaux des beaux-arts.



Dans le rôle de l’immonde pillard de Châtillon, on retrouve l’acteur Brendan Gleeson qui interprétait l’odieux Menelas dans le « Troy » ; certains acteurs n’ont vraiment pas de chance ! déjà en Menelas il était peu sympa, mais alors ici, je ne vous dis pas ! Comme contraste avec les preux chevaliers, il mérite un Oscar. David Thewlis, acteur anglais que l’on voit fréquemment mais qu’on ne remarque pas assez car il est fort discret, campe ici un moine hospitalier plein d’humour ; sa leçon sur les religions vaut à elle seule d’aller voir le film.



Et pour ceux qui douteraient de l’exactitude de certains passages dans le film, je les renvoie à l’excellente encyclopédie gratuite en langue anglaise WIKIPEDIA, où l’on peut retrouver tous les personnages du scénario écrit par William Monahan.


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