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Shijie, de Jia Zhang-Ke

Dans un parc d’attraction à l’extérieur de Pékin, style Disneyland, les touristes peuvent découvrir des répliques hyper-kitsch des plus célèbres monuments du monde (Taj-Mahal, Tour de Pise, Tour Eiffel, Big Ben, etc) - - le slogan « vous pouvez visiter le monde sans avoir à quitter Pékin » ! Quand on connaît la situation en Chine, le slogan...

... prend tout son sens avec un cynisme peu commun.



Des jeunes gens ayant quitté leur campagne y gagnent misérablement leur vie, côtoyant des petits criminels et immigrants espérant trouver un travail rémunérateur. Tous ont tôt fait de déchanter.



A travers les vies de la jeune danseuse Tao et celui qu’elle aime, le gardien Taischeng, on suit le quotidien des coulisses, des gardes dont le seul passe-temps semble être le jeu, ce qui mènera le frère de Tao à la prison. La vie de tous ces jeunes gens qui paraissent avoir de réels problèmes à exprimer leurs sentiments passe par les téléphones cellulaires, où sms remplacent les mots vrais. Les moments d’amour se passent dans des hôtels glauques, misérables, comme les dortoirs des employés. Ce qui exprime le mieux, dans le film, l’incommunicabilité entre ces êtres démunis, c’est le « dialogue » entre les deux danseuses, l’une Chinoise, l’autre Russe, se disant chacune l’amitié qu’elles ont l’une pour l’autre mais dans leur langue propre, inconnue de l’autre.



Subtilement on assiste à d’autres scènes tout aussi poignantes, à des moments glauques liés de temps à autre par des images animées tandis que chaque épisode est annoncé comme dans un jeu électronique.



L’ensemble déroute un peu toutefois le film est réellement intéressant, il y a une réelle recherche visuelle ; je n’ai pas vu les autres films de ce metteur en scène de la nouvelle génération des réalisateurs chinois ; ce film-ci est le seul que les autorités chinoises ont accepté de financer, la Chine s’ouvrant au monde, elle espère donner du pays une image moderne, mais son urbanisation la rend totalement inhumaine, comme nos propres cités d’ailleurs.



Jia Zhankg-Ke a voulu montrer que la Chine perd son identité culturelle en se modernisant, dans une tentative perdue de ressembler au monde occidental. Ce film est un témoignage social important, de ce que quelque chose voudrait être, ne peut pas être et, à mes yeux, le plus important est ce qui n’est pas dit ou montré, ce qui a d’ailleurs toujours été le grand art des artistes chinois de toutes les époques, sous tous les dictateurs et empereurs pratiquant la censure à outrance (même dans l’Antiquité, au Moyen-âge). L'interprétation des jeunes acteurs est excellente.


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