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Black Narcissus, de Powell & Pressburger

Des religieuses doivent installer un dispensaire et une école dans une région particulièrement hostile des montagnes des Indes ; le froid y règne, le vent y est maître des cérémonies, les indigènes ne veulent pas vraiment de ce que la soi-disant civilisation leur offre. Le bâtiment mis à leur disposition est un vieux palais ayant abrité autrefois...

... les multiples épouses et concubines du petit roi local. Les murs sont d’ailleurs peints de scènes plutôt érotiques pour un couvent !



Très vite des tensions se forment au sein du petit groupe, l’une des nonnes est particulièrement hostile à cette mission, elle semble d’ailleurs sombrer lentement dans la folie, s’entiche aussi de l’agent de liaison gouvernemental anglais chargé de les aider en cas de besoin. Le lieu où elles résident semble aussi propice à la résurgence de souvenirs mettant en péril leurs vocations.
La supérieure de ce couvent est la trop jeune Sœur Clodagh, assez orgueilleuse et sévère. Le drame couve et lorsqu’il éclatera, la congrégation éclatera elle aussi, juste avant la saison des pluies comme l’avait prédit Mr. Dean.



Dans les années 40, deux jeunes gens décidèrent de fonder une société de cinéma qui laisserait de la place à la créativité, alors que l’époque était plutôt aux films de propagande face à la seconde guerre mondiale. Il s’agissait de l’Anglais Michael Powell, réalisateur, et son ami le scénariste Emeric Pressburger, un Juif hongrois, ayant fui le nazisme. Ils entamèrent une collaboration longue et fructueuse qui offrit au cinéma plusieurs de ses plus belles réalisations. Leur compagnie s’appelait « THE ARCHERS » (les Archers) et se poursuivit jusqu’au milieu des années 50. Leurs films présentaient une créativité et des audaces dans les scénarios et mises en scène qui surprirent souvent leurs producteurs.



« Black Narcissus » date de 1946, a été totalement tourné dans les studios de Pinewood, Londres ; le film récolta trois oscars, notamment ceux de la direction artistique et de la couleur. Celle-ci est absolument superbe ; la lumière et les couleurs sont des acteurs à part entière du film, et Jack Cardiff mérita bien l’oscar qu’on lui descerna.
Les décors sont fabuleux, surtout lorsque l’on sait que tout a été fait en studio.

Quant à la musique, non seulement elle s’intègre parfaitement à l’histoire, mais elle la marque également.



Le film met aussi l’accent très subtilement sur le conflit de deux civilisations, cultures et religions tellement différentes ; les réalisateurs n’hésitent pas à montrer par petites touches dans les dialogues le racisme latent des Blancs, même si ce sont des religieuses.

Par ailleurs, il y a un érotisme latent et omniprésent faisant de ce film un pionnier en la matière. L’humour n’est pas non plus absent de cette histoire tirée d’un roman, ce qui fut exceptionnel pour le tandam Powell-Pressburger dont les scénarios étaient généralement originaux.



La jeune supérieure est interprétée par la très lisse et (en apparence) froide Deborah Kerr dont le jeu laisse entrevoir la passion qu’elle mettra bien plus tard dans « The Innocents » et « Night of the Iguana ».



Parmi les autres religieuses, figure l’actrice anglaise Flora Robson, très émouvante et bien que peu d’un physique peu gracieux en fonction des critères hollywoodiens, fut un visage célèbre du cinéma pendant les années 30 et 40. Elle fut aussi l’une des comédiennes attitrées du célèbre Old Vic Theater de Londres.



Celle qui vole quasiment la vedette à tous est la jolie Kathleen Byron dans le rôle de Sœur Ruth, celle qui n’a pas la vocation et qui perd pied peu à peu ; elle interprète à merveille la paranoïa et la folie qui la gagne peu à peu par simple travail du regard et de demi-sourires.



Dans un rôle très court, on découvre la toute jeune Jean Simmons qui en était à l’un de ses premiers rôles et maquillée outrageusement pour ressembler à une jeune Indienne. Le prince-général de l’histoire est interprété par Sabu, ancien enfant-acteur découvert à 12 ans et célèbre pour son interprétation dans « Elephant Boy » et la première version du « Jungle Book ».

L’autre homme de l’histoire, l’agent britannique cynique, servant de coordinateur avec le seigneur local est interprété par David Farrar, très séduisant.



Un DVD du « Black Narcissus » vient de paraître et je conseille vivement aux amateurs de thrillers, films d’ambiance, cinéphiles, de le regarder. C’est un excellent moment d’histoire du cinéma.

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